Nouveau rapport : Ne plus perdre de temps: la mise en œuvre des réparations pour les victimes devant la Cour pénale internationale
Un nouveau rapport de REDRESS qui indique que le système d’octroi des réparations devant la CPI doit être plus rapide dans l’octroi de réparations aux victimes.
Read it in English here
Suite à l’octroi de réparations dans trois cas devant la Cour pénale internationale (CPI) (Lubanga, Katanga and Al Mahdi), et les conclusions sur les réparations dans le cas Bemba, avant son acquittement l’année passée, le nouveau rapport de REDRESS évalue le progrès réalisé jusqu’à présent par la CPI pour octroyer des réparations de manière rapide et significative aux victimes des plus graves crimes internationaux.
Ne plus perdre de temps: la mise en œuvre des réparations pour les victimes devant la Cour pénale internationale souligne les efforts de la Cour, et les défis pour mettre en œuvre les dispositions légales entérinant les réparations progressives.
Le rapport salue les pas progressifs que la CPI a pris pour consolider sa jurisprudence sur les réparations, pour clarifier les problèmes procéduraux, et pour adopter une approche consultative et centrée sur les victimes pour déterminer les réparations. Cependant, le rapport indique également que, malgré les efforts de la Cour, le processus pour octroyer des réparations pour les victimes est devenu compliqué et long, et n’a pas produit de résultats tangibles pour les victimes.
Les victimes ont passé plusieurs années à attendre justice et réparations, cependant, à ce jour, seule une partie des victimes qui ont postulé, ou qui sont éligibles pour recevoir des réparations, ont obtenu de réels bénéfices, malgré des jugements qui octroient des millions d’euros ou de dollars américains. Par exemple, dans le cas Lubanga en République démocratique du Congo, 15 ans après les crimes, les victimes dans ce cas n’ont pas encore reçu les réparations qu’elles attendent, bien que le premier jugement sur les réparations a été rendu en 2012.
Les conclusions de REDRESS indiquent une série de facteurs qui empêchent la CPI d’octroyer rapidement des réparations aux victimes, en ce compris des approches judicaires inconsistantes ; des problèmes de capacité et de planification au Fonds au profit des victimes ; un manque d’orientation stratégique sur les réparations ; et l’absence de lignes directrices exhaustives, liant toutes les chambres, qui aident à favoriser une approche cohérente et constante sur les réparations.
Dans une série de recommandations, REDRESS demande à la Cour de renforcer ses processus, de dépasser les débats procéduraux et d’établir un calendrier pour octroyer de manière efficace et rapide les réparations. Le rapport recommande une gestion et un contrôle plus efficace de la phase de mise en œuvre des réparations, et le développement d’un cadre stratégique réglant les réparations applicable à toute la Cour.
Le rapport demande au Fonds au profit des victimes d’améliorer sa capacité interne et de planification pour mieux préparer les plans de mise en œuvre provisoires, et mettre en œuvre les jugements de réparation rendus par la Cour. Le rapport demande également à la Cour d’élargir ses programmes d’assistance aux pays où la Cour intervient et de commencer à assister les victimes beaucoup plus tôt dans les cas qui sont indument prolongés.
Lorraine Smith Van Lin, conseillère juridique chez REDRESS, a dit : « Les victimes ont déjà assez attendus pour que la CPI déterminent les procédures. Il est l’heure pour la Cour de passer à l’action et prendre des actions tangibles pour rapidement octroyer des réparations aux victimes qui peuvent avoir un réel impact sur leurs vies. »
Le rapport et les recommandations sont disponibles ici.
Le rapport va être lancé à un évènement sur invitation à la résidence de l’ambassadeur de Finlande à la Haye le 21 février 2019, pendant lequel il y aura un panel d’experts internationaux sur les réparations pour les victimes devant la CPI.
Pour plus d’informations ou pour une interview, veuillez contacter Eva Sanchis, la responsable communications chez REDRESS au+44(0)20 7793 1777; +44(0)7857110076 (en dehors des heures de travail) ou [email protected].
Note aux rédacteurs
- A propos de la méthodologie
Pendant 10 mois, REDRESS a sondé les acteurs clés dans le processus d’octroi des réparations, en ce compris le personnel de la CPI, du Fonds pour les victimes, de la Section de la Participation des Victimes et des Réparations, ainsi que des universitaires, la société civile et des experts légaux. REDRESS a également analysé les textes juridiques, les actes de procédure, les jugements, les documents de politique et les commentaires académiques sur la procédure de réparations devant la Cour. Aucune victime n’a été directement contactée pour ce rapport. Les points de vue des victimes ont été apportés indirectement par leurs représentants légaux. En octobre 2018, REDRESS a organisé à la Haye une table ronde d’experts sur les réparations. Parmi les participants figuraient le personnel du Greffe de la CPI, le Bureau du procureur, les représentants légaux des victimes, le VPRS, les chargés de dossiers, des universitaires, des experts légaux de la République démocratique du Congo, et des représentants des organisations de la société civile. De plus, en décembre 2018, REDRESS a organisé un évènement sur les réparations en parallèle de la 17e Assemblée des Etats parties co-organisé à la Haye par la Finlande, la Suède, la Suisse et le Chile. Les discussions lors de ces deux évènements ont également aidé à former les conclusions et recommandations de ce rapport.
- Cas devant la CPI au stade des réparations
Pour l’instant trois cas devant la CPI sont au stade des réparations : le procureur c. Thomas Lubanga Dyilo et le Procureur c. Germain Katanga, liés à la situation en République démocratique du Congo, ainsi que le procureur c. Ahmad al-Faqi Al Mahdi, lié à la situation en République du Mali. Les procédures préparatoires pour les réparations avaient aussi commencées dans le cas du procureur c. Jean-Pierre Bemba, qui était lié aux investigations du procureur de la CPI en République centrafricaine, mais ces procédures ont été abandonnées suite à l’acquittement, par la Chambre d’appel, de M. Bemba en juin 2018.
- Que sont les réparations ?
Les Etats ont une obligation d’accorder des réparations aux victimes de torture. Les réparations sont des mesures qui visent à répondre aux maux soufferts par les victimes de violations des droits humains. Il y a diverses formes de réparations, en ce compris, trouver la vérité, attribuer la responsabilité, et traduire en justice les auteurs. Les réparations peuvent également inclure la compensation des victimes pour les couts de leur traitement médical et une aide matérielle pour la reconstruction de leur vie. Des mesures pour prévenir la répétition des actes de torture sont également essentielles. Toutes ces mesures peuvent aider à rendre de la dignité aux survivants d’actes de torture.
- A propos de REDRESS
REDRESS utilise la loi pour obtenir justice et réparations pour les survivants de torture, pour lutter contre l’impunité des gouvernements et des individus qui commettent des actes de torture, et pour développer et promouvoir le respect des standards internationaux. REDRESS soutient le développement progressif de la CPI comme une institution qui complémentent les procès nationaux pour rendre justice pour les victimes de crimes internationaux, avec un accent sur les droits des victimes, en ce compris leur participation, protection, représentation légale et l’octroi de réparations. Nous intervenons devant la CPI et collaborons avec le Greffe et le Fonds pour les victimes afin de faire avancer leurs politiques et faire implémenter les réparations pour les victimes. Nous collaborons également avec les tribunaux hybrides pour les crimes de guerre, ainsi que les tribunaux nationaux, en vertu du principe de complémentarité. Enfin, nous coordonnons le Groupe de travail sur les droits des victimes, un réseau informel mondial d’experts et défenseurs travaillant sur la promotion de la justice pour les victimes de crimes internationaux.